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Prix littéraire des lycéens : la sélection de l’Agence régionale du Livre !

Mis à jour le 12 février 2024

Depuis deux décennies, le Prix littéraire des lycéens et apprentis propose aux jeunes du territoire de se plonger dans des œuvres soigneusement sélectionnées et d’aller à la rencontre de leurs auteurs. Passage en revue de la sélection 2024 en compagnie de l’Agence régionale du Livre.

Chaque année, 10 ouvrages contemporains – 5 romans et 5 bandes dessinées – sont sélectionnés pour le Prix littéraire des lycéens et apprentis de la Région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur. En 20 ans, ce dispositif aura permis de faire découvrir 222 livres à plus de 20 000 élèves !  Au fil des mois, forums et rencontres avec les auteurs ponctuent la vie des lycéens, qui désignent leur lauréat, dans chaque catégorie, à la fin de l’année scolaire. La sélection des œuvres est le fruit du travail d’un Comité de sélection composé de libraires, bibliothécaires, professeurs – tous partenaires et acteurs du Prix – piloté par l'Agence. Résultat, une sélection exigeante mais accessible, composée d’histoires d’amour, d'amitié, de famille, d’aventures... « Cette année encore, on trouve dans la sélection des thèmes assez sombres, mais nous savons que ces sujets plaisent aux jeunes, détaille Laurie Clément, de l’Agence régionale du Livre. Toute la difficulté est de savoir ce que l’on peut aborder ou pas avec les lycéens. Il faut s’adapter à eux, tout en leur proposant de découvrir des œuvres qu’ils ne seraient pas aller chercher par eux-mêmes, qui vont leur donner à réfléchir, les émouvoir, les faire grandir. »
Alors, que réserve le cru 2024 ?

La sélection de romans

Les Enfants endormis, d’Anthony Passeron

Louise aime son fils, Désiré, d’un amour inconditionnel et aveugle. À tel point aveugle que Louise refusera d’admettre ce que tout le monde a compris, puis quand elle ouvrira les yeux, refusera d’accepter et de nommer. Le si prometteur Désiré, celui qui aspirait toute la fierté et les ambitions de la famille, trop peut-être, s’est laissé glisser dans la paresse et les plaisirs faciles, jusqu’à ce qu’un mal alors inconnu ne commence à le ronger. Des deux côtés de l’Atlantique, médecins et chercheurs vont lutter pour identifier et soigner cette épidémie nouvelle qui fait des ravages chez les homosexuels et les toxicomanes.


Le mot de l’Agence régionale du Livre 
Pour son premier roman, Anthony Passeron nous livre une autofiction qui nécessite d’avoir le cœur bien accroché. Celle-ci articule deux histoires à la fois, celle de la famille de Désiré, et celle de la recherche contre le sida, très bien documentée. Il est intéressant pour les lycéens de revenir sur cette épidémie que leur génération n’a pas vu naître.  

Les Gens de Bilbao naissent où ils veulent, de Maria Larrea

En 1943, une prostituée de Bilbao donne vie à un garçon, Julian, qu’elle confie aux jésuites d’où il s’enfuira empli de rage. Peu après en Galice, alors qu’elle bat le poulpe en plein vent, une femme accouche d’une fille et s’en débarrasse aussitôt auprès des sœurs d’un couvent. Plus tard encore, Julian et Victoria se rencontrent et partent travailler en France. C’est là que grandira Maria, enfant choyée, protégée à l’excès. Fille unique de deux parents abandonnés, Maria mène l’enquête et reconstitue le dédale romanesque de sa mémoire familiale.

Le mot de l’Agence régionale du Livre 
Il s’agit d’une histoire de famille assez triste et pourtant lumineuse. Maria Larrea nous offre un récit qui virevolte dans tous les sens et se lit très facilement.

On était des loups, de Sandrine Collette

Liam et sa femme Ava vivent solitaires en montagne, retirés dans une nature rude. Alors que Liam traque un loup menaçant leur territoire, Ava succombe à l’attaque d’un ours. À son retour, Liam découvre, sous le corps d’Ava, leur enfant qu’elle a protégé et sauvé. Affronter la perte de l’être aimé est intolérable, s’occuper d’un enfant insurmontable, qui plus est dans cet environnement sauvage et hostile.

Le mot de l’Agence régionale du Livre 
L’autrice sort de son registre habituel qu’est le roman noir, pour questionner le rapport à la parentalité dans tous les sens. « On était des loups » est une œuvre a la prose assez spéciale, il y a un effet de non-respiration qui fonctionne très bien et nous tient en haleine tout au long de la quête du personnage.

Tenir sa langue, de Polina Panassenko

Rebaptisée Pauline par négligence, facilité, souci d’intégration… l’auteure raconte son arrivée en France à l’âge de quatre ans. À hauteur d’enfant, elle dit l’exil de sa famille qui a quitté la Russie après la chute de l’URSS, le manque de ses grands-parents restés là-bas, la découverte d’un nouveau pays, de nouveaux codes, et décortique les sons d’une langue étrangère qui parfois résonne étrangement dans sa langue maternelle.

Le mot de l’Agence régionale du Livre 
Cet ouvrage soulève la question de l’immigration, qui parle à beaucoup de jeunes. L’autrice aborde ainsi un sujet fort dans un roman assez drôle, avec des scènes de quiproquos cocasses, qui se lit d'une traite.

Tibi la blanche, d’Adrien Bels

À Thiaroye, quartier proche de Dakar, trois amis s’apprêtent à passer le bac. Issa s’est équipé d’un bic marabouté, qui donne la confiance… Lui sera styliste, c’est sûr. Neurone, le bon élève du trio, réussit à l’école mais s’insurge contre l’ordre établi qui veut qu’il succède à son père à la tête de la prospère entreprise familiale. Or Neurone n’aime que Tibilé, l’inaccessible Tibi qui partira poursuivre ses études au loin une fois le précieux sésame en poche. S’ils viennent de milieux sociaux différents et ont des rêves d’avenir totalement opposés, les amis partagent un même tiraillement : aller en France.

Le mot de l’Agence régionale du Livre 
Le personnage féminin du livre, inspiré de la vie de la femme de l’auteur, soulève la question coloniale à travers son départ planifié de l’Afrique vers la France, avec son lot de complexités. Le roman est parfois assez familier, il s’agit d’un beau témoignage sur la jeunesse.

La sélection de bandes-dessinées

Les Étoiles s’éteignent à l’aube, de Vincent Turhan

Âgé de seize ans, Franklin Starlight est appelé au chevet de son père Eldon avec qui les liens sont rompus depuis longtemps. Il découvre un homme détruit par des années d’alcoolisme. Eldon, qui a du sang indien, sent sa fin proche et demande à son fils de l’accompagner en montagne pour y mourir comme un guerrier, en dépit d’un passé peu glorieux.

Le mot de l’Agence régionale du Livre
Cette BD est adaptée d’un roman repéré en son temps par le Comité de sélection, et qui est illustrée avec un dessin classique et beaucoup de techniques différentes. Tout le déroulé de ce voyage est passionnant, de la nature hostile aux personnages marquants.

Toutes les morts de Laïla Starr, de Ram V et Filipe Andrade

Convoquée par l’incarnation divine de toutes bonnes choses, au-delà des nuages, la déesse de la Mort se voit licenciée après une éternité de loyaux services. En bas, un enfant porteur de la vie éternelle va naître, aussi n’a-t-on plus besoin d’elle. Un corps humain va lui être attribué, puis madame la Mort sera envoyée sur terre où elle pourra profiter à loisir des plaisirs des simples mortels. Sa colère passée, elle n’exigera qu’une chose, être parachutée à proximité de cet enfant, Darius. À la recherche perpétuelle de son “adversaire”, qui grandit et vieillit, elle sera sauvée à plusieurs reprises par le dieu de la Vie, mènera des existences riches d’expériences, pour comprendre peu à peu l’attachement, le chagrin, la compassion.

Le mot de l’Agence régionale du Livre
C’est le 1er comics à entrer dans la sélection du Prix ! signé par un duo qui a notamment travaillé chez Marvel. C’est une BD au dessin magnifique, avec une dimension philosophique incarnée par la déesse de la mort. Sa particularité tient aussi à son rythme, avec des chapitres courts et percutants. Cette œuvre parle beaucoup aux lycéens.

Naphtaline, de Sole Otero

Argentine, 2001. Sur fond de crise sociale et politique, la jeune étudiante Rocio s’installe dans la maison de Vilma, sa grand-mère décédée depuis peu. Guère appréciée, l’acariâtre Vilma s’était coupée de toute la famille, sauf de sa petite-fille qui petit à petit s’empare avec émotion de la vie de cette femme, une vie faite de désenchantements et de sacrifices. Dans ses pérégrinations intérieures, Rocio découvre l’histoire d’un couple arraché à son Italie natale sous la dictature de Mussolini, alors que Vilma est encore bébé. Elle pose un récit des générations, de la place de la femme, des choix qui n’en sont pas toujours. Cette incursion dans les souvenirs familiaux lui permettra de faire le point sur sa propre vie. La naphtaline, c’est cette odeur de maison d’antan bien entretenue et dont le souvenir s’imprègne.

Le mot de l’Agence régionale du Livre
Cette BD signée d’une autrice argentine présente un dessin très dense, ultra coloré. Elle explore elle aussi la question de la migration, de la filiation et celle de la condition des femmes.

Lucien, de Guillaume Carayol et Stéphane Sénégas

Lucien est un doux simplet, un gentil poète balayeur dans un parc, chorégraphe de feuilles mortes. Il mène une vie routinière et subit sans broncher les moqueries dont il est l’objet, car tout le monde se moque de lui. Tout le monde sauf le petit Paul qui se lie d’amitié avec lui. Cette parenthèse enchantée ne suffira malheureusement pas à le sauver d’un funeste destin, car Lucien perd parfois le contrôle. À la suite d’un terrible malentendu, Lucien dérape et sera le jouet de mauvaises personnes qui vont le maltraiter et le pousser à commettre de très grosses bêtises. Cerné d’individus sans scrupules, harcelé, le si bouleversant Lucien déploie son histoire en dessins tour à tour légers et poétiques, ou chargés et sombres, comme pour mieux explorer la noirceur de l’âme humaine. Un personnage hors-normes d’une tendresse infinie, un récit d’amitié qui ne cache rien de la cruauté de la vie.

Le mot de l’Agence régionale du livre
Bande dessinée en noir et blanc, dont l’histoire est à la fois extrêmement poétique et sombre. C’est celle d’une belle rencontre qui bascule dans une grande violence.

Waco Horror, Elizabeth Freeman, l’infiltrée, de Lisa Lugrin, Clément Xavier, Stéphane Soularue

Texas, 1916. Elizabeth Freeman et William Du Bois combattent les inégalités et conviennent d’unir leurs efforts. Elle lutte pour les droits des femmes, lui contre la ségrégation raciale dont les Noirs sont victimes. Alors que la suffragette part donner une conférence à Waco, Du Bois lui demande d’enquêter, l’air de rien, sur la disparition préoccupante du jeune Jesse Washington, âgé de 17 ans. Chaleureusement accueillie dans un premier temps, Elizabeth s’émeut rapidement de la frontière qui sépare ici Blancs et Noirs, ces derniers étant parqués hors de la ville et traités comme des rebus de l’humanité. Mais Elizabeth n’a pas froid aux yeux. En déjouant les pièges tendus, elle va découvrir ce que la bonne société blanche a de plus sombre.

Le mot de l’Agence régionale du Livre
Cette BD suscite beaucoup de curiosités, elle a d’ailleurs remporté le Prix des lycéens en Bourgogne l'année dernière. C’est une histoire cruelle sur le racisme aux États-Unis, qui parle aux jeunes d’aujourd’hui, et notamment à ceux qui ont suivi les mouvements Black Lives Matter.

Les élèves aussi prennent la plume !
Chaque année en parallèle du prix, les élèves ont également l’occasion de laisser s’exprimer l’auteur qui sommeille en eux avec le concours d’écriture. Après “La vie devant soi” (2018), “Derrière la porte” (2019), “Un bonheur fou” (2020), “J’ai fait un rêve” (2021), “Sur un air de révolte” (2022) et “Un peu de douceur” (2023), ils pourront cette fois explorer le thème « Le hasard fait bien les choses ».

Mis à jour le 15 novembre 2024